Travailleurs sociaux des CPAS, secret professionnel et lutte contre le terrorisme : une circulaire (très) attendue a été envoyée aux CPAS

Cet article a été publié dans la revue Bulletin juridique et social (www.lebulltin.be), en abrégé B.J.S., n°2017/595, parue aux éditions ANTHEMIS.

Sauf pour témoigner en justice et si la loi les y oblige, les personnes qui sont dépositaires, par état ou par profession, des secrets qu’on leur confie ne peuvent révéler ceux-ci. Elles sont tenues par le secret professionnel dont la violation est sanctionnée pénalement (article 458 du Code pénal). De très nombreuses personnes sont susceptibles d’être concernées par cette obligation, dont les travailleurs sociaux des CPAS.

Une loi du 17 mai 2017 (Loi du 17 mai 2017 modifiant le Code d’instruction criminelle en vue de promouvoir la lutte contre le terrorisme. Elle est entrée en vigueur le 1er septembre 2017) instaure une exception et ‘lève’ cette obligation de secret professionnel dans le chef des institutions de sécurité sociale dans un cadre matériel restreint : la lutte contre les infractions terroristes.

Le SPP Intégration sociale a rédigé une circulaire à l’attention des CPAS afin de donner quelques balises (Disponible à l’adresse internet suivante : https://www.mi-is.be/fr/reglementations/circulaire-relative-la-mise-en-oeuvre-de-la-loi-du-17-mai-2017-modifiant-le-code). Après avoir rappelé le contenu du nouvel article 46bis/I du Code d’instruction criminelle ainsi que la notion d’infraction terroriste (contenue à l’article 137 du Code pénal), la circulaire précise le contenu des obligations de communication, passive et active, d’informations qui s’imposent aux institutions de sécurité sociale.

Premièrement, une obligation d’information passive est mise à charge des institutions de sécurité sociale en ce que celles-ci doivent communiquer au procureur du Roi qui en fait la demande, écrite et motivée, les renseignements administratifs qu’il juge nécessaires dans le cadre de la recherche d’infractions terroristes.

La circulaire précise que cette demande et son suivi seront gérés par le directeur général ou le président. La demande du parquet doit comporter une description précise des renseignements demandés ainsi que la forme dans laquelle ceux-ci seront communiqués.

La demande ne saurait porter que sur des renseignements à caractère administratif dont la circulaire donne quelques exemples (Est-ce que le domicile et la résidence de l’intéressé sont identiques ? Perçoit-il un RIS et dans l’affirmative à quel taux ?). Il est donc exclu de communiquer les confidences de l’intéressé, des informations sur son état d’esprit, sa psychologie, son attitude lors des entretiens et bien entendu les données médicales.

Les informations doivent être communiquées « sans délai » c’est-à-dire le plus vite possible. La circulaire recommande de mettre en place une procédure spécifique afin que chaque agent sache clairement la voie hiérarchique à respecter en présence d’une telle demande.

Les personnes du CPAS qui ont connaissance de la demande du parquet ou y prêtent leurs concours (et donc pas seulement le directeur général ou le président…) sont tenues par le secret professionnel... En outre, les personnes dont la collaboration est nécessaire pour fournir les informations au parquet (et donc, ici encore, pas seulement le directeur général ou le président…) peuvent se voir infliger une amende si elles refusent de transmettre celles-ci.

Deuxièmement, une obligation d’information active est mise à charge de tout membre du personnel d’un CPAS qui prend connaissance d’une ou de plusieurs informations pouvant constituer des indices sérieux d’une infraction terroriste. Il est recommandé au membre du personnel concerné de néanmoins consulter sa hiérarchie, ‘sauf si les circonstances ou le degré d’urgence l’en empêchent’. Cette communication doit se faire au parquet compétent sur le champ. Fort opportunément, cette obligation, qui implique la mise en œuvre de notions juridiques complexes, n’est quant à elle pas sanctionnée pénalement.

Sébastien DOCQUIER

 

Posté le 04 December 2017 Retour aux actualités